Révision de la Constitution

Le régime de la V République est relativement stable, mais la France a malgré tout connu une forte instabilité constitutionnelle en raison des nombreuses révisions, et notamment de celle de 2008, qui ont largement modifié la Constitution originelle. La Constitution de 1958 a ainsi connu 22 révisions adoptées en vertu de l’article 89.

Procédure de la révision

L’article 89 de la Constitution prévoit la procédure de révision de la Constitution, mais ce n’est pas sur ce seul fondement que les révisions ont été effectuées. Ainsi, la révision de 1962 prévoyant l’élection du président de la République au suffrage universel direct s’appuie sur l’article 11 de la Constitution.

L’utilisation de l’article 11 de la Constitution a suscité de vives critiques car il a permis de modifier des éléments majeurs de la Constitution. Nombres de juristes ont en effet considéré contraire à la Constitution l’utilisation de cet article. Le recours à l’article 11 permettait au Général de Gaulle de passer outre le vote des assemblées, qui constitue la première phase de la procédure de l’article 89. Pour cette raison, le Conseil d’Etat a confirmé indirectement l’inconstitutionnalité de la procédure dans son arrêt Sarran et Levacher de 1998, par lequel il distingue les référendums de l’article 11 relatifs aux matières législatives des procédures de l’article 89 relatives aux matières constitutionnelles.

L’article 89 prévoit deux types de révision : la procédure « normale » et la procédure « abrégée ». La procédure normale nécessite le recours au référendum ; il s’agit donc d’une procédure très lourde qui demande à la population de s’investir sur des questions parfois mineures parfois éloignées de leurs préoccupations. Pour passer outre ces difficultés, la procédure abrégée permet au Congrès du Parlement d’adopter la loi constitutionnelle. En pratique, la procédure abrégée est devenue la procédure normale. Ainsi, la révision de 2008, pourtant très importante, n’a pas fait l’objet d’un référendum.

Déroulement de la révision

Il revient au président de la République, sur proposition du Premier ministre et aux membres du Parlement de prendre l’initiative de révision. Le projet ou la proposition de loi constitutionnelle sont ensuite soumis pour discussion et vote à l’Assemblée nationale et au Sénat (prioritaire s’agissant des questions relatives à l’organisation des collectivités territoriales) qui doivent l’adopter à la majorité des suffrages exprimés. Puisqu’il s’agit d’une loi constitutionnelle, une commission mixte paritaire ne peut être réunie.

Lors de cette procédure, chaque assemblée peut bloquer la révision.

Après l’adoption du texte, le président de la République décide de la procédure (abrégée ou normale) qu’il souhaite mettre en œuvre. Néanmoins, le choix est relatif dans la mesure où la procédure abrégée ne peut être utilisée que pour les projets de révision (et pas les propositions). Le président de la République peut également refuser de poursuivre la procédure.

Une fois le choix effectué par le président de la République, le Parlement réuni en Congrès se prononce définitivement sur le projet de loi constitutionnelle. Il doit recueillir les trois cinquièmes des suffrages exprimés. La grande majorité des révisions a été adoptée en vertu de l’article 89 par le Congrès. Si au contraire le président de la République a choisi le référendum, les électeurs sont convoqués par décret du Président ; le texte est adopté à la majorité des suffrages exprimés.

Cas de révisions

Depuis 1958, beaucoup de révisions de la constitution ont eu lieu (plus de vingt). Certaines de ces révisions ont profondément modifié des éléments entiers du régime, sans toutefois transformer la structure même du régime.

Parmi les grandes révisions, celle de 1962 a permis l’élection du Président de la République au suffrage universel direct.

Celle de 2000 a instauré la règle du quinquennat, réduisant à 5 ans le mandat du Président de la République. Ce dernier est donc élu juste avant les députés, ce qui lui permet d’avoir une majorité à l’Assemblée qui le soutiendra. Cela permet ainsi d’éviter les périodes de cohabitation (majorité parlementaire hostile au Président de la République).

La grande révision de 2008 a quant à elle permit de revaloriser le rôle du Parlement. Les institutions ont ainsi été remodelées pour les mettre dans la réalité de leur pratique et rééquilibrer les pouvoirs au profit du Parlement, qui a obtenu davantage de pouvoirs dans l’exercice de ses prérogatives (vote et examen des lois).

Certaines révisions ont touché le Conseil constitutionnel : élargissement de la saisine en 1971, mise en place de la Question Prioritaire de Constitutionnalité en 2008 (tout justiciable peut demander la constitutionnalité de la loi applicable au litige).

D’autres révisions ont été engagées pour permettre à la France de ratifier les traités européens. Ainsi en 1992, l’adoption du traité de Maastricht a imposé le transfert de compétences importantes à l’Union européenne, ce que la Constitution devait permettre.

Aujourd’hui, un titre est consacré à l’Union européenne au sein de la Constitution : il intègre la France dans un cadre juridique et institutionnel qui est au-dessus de la Constitution. Près de la moitié du domaine qui relève traditionnellement de la loi qui est élaborée par les institutions européennes (Parlement européen et Conseil des ministres).

L’ensemble de ces révisions n’ont pas remis en cause les grands principes de la Constitution.

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