Néo-classiques
Fondements
Les années 1860 voient naître une nouvelle école de pensée : l’école néo-classique. Les nouveaux penseurs de cette école reprennent les classiques, avec lesquels ils s’accordent sur certains concepts (liberté économique, concurrence, primauté de l'initiative individuelle ou encore mise en place d’un Etat gendarme). Ils croient ainsi, comme les classiques, en la supériorité du libéralisme économique ; la libre concurrence doit en effet permettre à l’économie de marché de s’autoréguler. Les lois naturelles de l’économie s'épanouissent ainsi, sans intervention de l’Etat.
Mais les néo-classiques abandonnent néanmoins quelques théories classiques (ex : théorie de la valeur travail), et bouleversent les analyses de l’économie politique classique (celles de Ricardo notamment). Pour eux en effet, la société n'est pas divisée en classes sociales, mais simplement composée d’individus dont le comportement individuel doit être analysé ; ils prennent donc en compte leur volonté ou non de travailler, celle de maximiser leur profit en fonction des ressources dont ils disposent, etc.
Les fondateurs de cette pensée sont Stanley Jevons, Carl Menger et Léon Walras (français). Ils regroupent ainsi trois grandes écoles : l’Ecole de Lausanne, celle de Cambridge et celle de Vienne.
De nouvelles théories
Une nouvelle théorie de la valeur
La théorie de la valeur travail est abandonnée au profit de la valeur-utilité. Pour les néo-classiques, c’est seulement en fonction de l’utilité d’un bien économique que celui-ci est évalué ; la rareté du bien devient un élément primordial à prendre en compte. La valeur des biens n'est donc plus définie par leur utilité globale mais par la chance qu'a un agent économique de se les procurer.
Les néo-classiques passent d'une conception objective de la valeur, qui était la valeur travail, à une conception subjective, qui est la valeur utilité. La valeur des biens n'est pas déterminée par la quantité totale des produits que l'on peut acquérir mais par le coût nécessaire à sa production (production de la dernière unité). L’utilité de la dernière unité consommée de chaque bien est appelée utilité marginale ; c'est elle qui permet de déterminer sa valeur. Ce concept se situe au carrefour entre la notion d'utilité et celle de rareté. Grâce à ce concept, les néo-classiques parviennent à expliquer le paradoxe d’Adam Smith : l’eau n’est pas chère parce que son utilité marginale est faible ; le diamant est au contraire très prisé, ce qui lui donne sa forte utilité marginale.
Ainsi, l’offre d’un bien est fonction des coûts de production, et la demande est fonction de son utilité. Marshall va tenter d’effectuer un lien entre la théorie de la valeur-travail et la théorie de la valeur-utilité : à court terme, la valeur des biens dépend de la demande (car la capacité productive n’a pas le temps d’augmenter) ; à long terme, elle dépend des coûts de production (car les entreprises ont eu le temps de s’adapter à l’intensité de la demande et ont accru leur production pour y faire face). Cette théorie permet d'expliquer le comportement des entreprises, comme des consommateurs, dans leur recherche d'optimisation de profits.
La théorie de l’équilibre général
Alfred Marshall a élaboré la théorie de l’équilibre partiel en ne prenant en compte qu'un marché. Ainsi, en se plaçant sur un seul marché, il montre comment l’offre et la demande s’équilibrent, cela, indépendamment des autres marchés. Mais l’équilibre partiel d’un marché a nécessairement des incidences sur les autres marchés. En effet, une modification du salaire, sur le marché du travail, entraîne des modifications sur le marché des biens de consommation par exemple. Walras va donc montrer qu'il existe une interdépendance entre les marchés. Pour comprendre le phénomène, il prend l’exemple du commissaire priseur : par ses annonces, l'offre et la demande parviennent à s’accorder. C’est donc par le jeu des tâtonnements progressifs sur le marché que l’équilibre s’établit. Ce concept s'applique à tous les marchés, ce qui conduit à créer une situation d’équilibre général. Sur la base de cette théorie, Pareto va montrer qu’il existe un optimum au-delà duquel la satisfaction d’une personne entraînera nécessairement l’insatisfaction d’une autre.
Walras considère que les marchés doivent, pour atteindre l'équilibre, reposer sur la libre concurrence. Cette dernière permet aux individus d'atteindre une meilleure place sociale, et ces bonnes situations sociales se ont des effets positifs à un niveau plus élevé, celui de la société.
Sur le chômage
Les néo-classiques considèrent qu’il ne peut exister de chômage durable car le marché crée automatiquement un équilibre entre l’offre et la demande de travail. Ainsi, le plein emploi est automatiquement atteint si rien ne vient perturber le marché. En effet, si à un moment donné, l’offre de travail (par les travailleurs) est supérieure à la demande, la concurrence qui s'instaure entre les travailleurs conduit nécessairement à la diminution des salaires. Puisque le coût du travail diminue, la demande de travail (dles entreprises) croissant. Ainsi, l’équilibre revient naturellement.
Ce n’est donc qu'à cause des interventions de l'Etat et des syndicats que le marché ne parvient pas à s’équilibrer automatiquement. Le chômage est donc volontaire : c’est parce que les travailleurs refusent la baisse de salaire que le chômage existe.
Mais cette analyse peut être critiquée. En effet, la baisse des salaires qui suit l’augmentation de l’offre de travail est susceptible d’entraîner une baisse de la consommation. Dans ce cas, la demande ne peut pas s’accroître, contrairement à ce que disent les néo-classiques.
Sur les crises
Selon les néo-classiques, la crise de surproduction ne peut pas exister : à l’offre de produit sur un marché correspond nécessairement une demande égale (les forces de marché s’exerçant librement). La production doit donc pouvoir s’écouler naturellement. S’appuyant sur la loi des débouchés de Say, les néo-classiques, qui considèrent que la monnaie n’est qu’un moyen de transaction, pensent que le revenu est entièrement consommé par les ménages. Pourtant, seule une partie du revenu est consommé directement, l’autre est épargnée et servira pour l’achat de biens d’équipement ultérieurs. Cette conception semble donc peu fiable dans la mesure où elle considère seulement la monnaie comme un instrument d’échange.