Déterminants de l'épargne, consommation, revenus
Le revenu disponible d’un ménage est partagé entre l’épargne et la consommation. Il s’agit d'en connaître les déterminants.
La consommation
Keynésianisme versus monétaristes
Keynes montre que le niveau d’emploi est déterminé par de la demande des consommateurs : quand la demande anticipée augmente, les entreprises doivent embaucher davantage pour accroitre leur offre et ainsi faire face à la demande, ce qui a pour effet de faire diminuer le chômage. C’est donc la propension à consommer qui détermine la demande effective et le niveau de l'emploi. Selon l’auteur de la Théorie générale, cette propension à consommer est une fonction croissante du niveau de revenu ; ainsi, plus le revenu est important, plus la propension à consommer s’accroît. Keynes montre ainsi comment s’effectue le partage entre la consommation et l’épargne : si les revenus de l’agent augmentent, il accroît ses dépenses, mais dans une moindre mesure puisque le travailleur aura davantage tendance à épargner ; c’est ce qu’on appelle la propension marginale à consommer. Il considère que la consommation est une fonction stable du revenu : en moyenne, « les hommes tendent à accroître leur consommation à mesure que le revenu croit ».
Mais si Keynes considère que la consommation croit avec le revenu, Friedman pense au contraire que l’accroissement du revenu n’entraine pas nécessairement l’augmentation de la consommation. En effet, le revenu comporte deux composantes : une composante permanente (il s’agit des ressources stables comme le revenu, qui ne sont pas modifiées à court terme), et une composante transitoire (il s’agit d’un phénomène conjoncturel qui modifie par exemple le revenu). Friedman montre que la composante transitoire n’a pas d’effet sur la consommation puisque les ménages n’ont pas intégré l’accroissement de leurs ressources à leur revenu habituel, permanent ; ce n’est donc qu’une fois que celui-ci est intégré que la consommation augmente. Ainsi, l’augmentation des revenus n'entraine pas automatiquement l’augmentation de la consommation. De cette façon, Friedman considère que la propension à consommer est stable et régulière quelques soient les variations de revenu.
Keynes considère donc que le niveau de consommation dépend du revenu courant du ménage ; c’est ce qu’il appelle la « loi psychologique fondamentale ». Au contraire, Friedman pense qu’il dépend du revenu permanent (on prend en considération les revenus présents, passés et futurs pour déterminer le niveau de consommation, non seulement l’argent dont l'agent dispose à un instant précis).
La stabilité de la consommation, ou l’hypothèse du cycle de vie
De nombreuses critiques ont contredit la vision keynésienne. Kuznet a ainsi montré la relation entre la consommation et le revenu des ménages américains entre 1869 et 1938 en observant la constance de la propension moyenne à consommer dans le temps.
Aussi, Brown explique les discordances qui existent entre le court terme et le long terme. Il considère que la consommation dépend des revenus présents et passés. Ainsi, même si les revenus diminuent à un moment donné, les ménages ne vont pas pour autant revoir leur consommation à la baisse : c’est l’effet cliquet.
Franco Modigliani montre que même si le revenu est variable au cours de la vie, la consommation, elle, reste stable. Au début de la vie professionnelle, l’individu emprunte, par exemple pour payer ses études. Ensuite, il va rembourser ces emprunts alors qu’il est entré dans la vie active, et épargner progressivement. A la fin de sa vie, il utilise l’épargne constitué durant sa vie active. Finalement, l’agent a une consommation similaire tout au long de sa vie.
Le taux d’intérêt, déterminant de l’épargne et de la consommation
Les auteurs classiques considèrent que la propension à épargner dépend du taux d’intérêt : si le taux d’intérêt augmente, alors les ménages ont tout intérêt à épargner car laisser leur argent dormir sur un compte est rémunérateur. Les ménages diminuent donc leur consommation pour épargner et ainsi maintenir leur patrimoine. C’est ce que l’on appelle : l’effet de substitution.
A l’inverse, si le taux d’intérêt augmente, l’agent sait qu’il pourra avoir d’avantage d’argent dans le futur car il a des placements. Il va donc davantage chercher à consommer. C’est ce que l’on appelle : l’effet revenu.
.Allard montre que si la consommation présente et la consommation future sont substituables, l’effet de substitution l’emporte. En revanche, si la consommation présente est seulement complémentaire de la consommation future, l’effet revenu l’emporte (car les gains s’ajoutent alors).
De son côté, John Stuart Mill montre que l’accroissement de l’épargne conduit les individus à augmenter leur capital ; mais pour cela, il faut que le taux d’intérêt soit avantageux puisque l’attente d’un investissement futur peut être longue.
Epargne et investissement
Selon Keynes, le taux d’épargne est déterminé par le niveau d'investissement : en période de sous-emploi, l’épargne accroit le chômage (car il y a moins de demande de biens de consommation et d’équipement puisque l’on consomme moins et que les entreprises n’emploient pas d’avantage car la demande effective est alors trop faible). Les investissements sont faibles et on épargne donc davantage.
Keynes montre que l’investissement est créateur d’épargne : si l’Etat décide de faire des travaux, il passe commande auprès d’entreprises qui investissent dans les biens d’équipements nécessaires ; de cette façon, l’activité s’accroit, tout comme les revenus, ce qui entraîne l’augmentation de l’épargne et de la consommation (puisque l’épargne suit le niveau de revenu, plus l’investissement de départ est important, plus l’épargne augmente).
Selon Keynes, l’épargne est déterminée par le niveau de revenu des agents économique. Alors que les classiques pensent que l’épargne n’est qu’une consommation future (on épargne pendant un temps pour mieux consommer ensuite), Keynes attribue d’autres motifs à l’épargne :
- faire une réserve de monnaie pour les dépenses imprévues
- prévoir ses besoins futurs (préparer sa retraite)
- conserver une certaine somme pour investir ensuite
- percevoir des revenus par les dividendes ou les intérêts (on accroît le stock de capital)
- transmettre un capital aux descendants
- avoir une capacité d’action qui ne dépende pas que des revenus
Dans le cadre des entreprises, Keynes montre que d’autres motifs peuvent les inciter les entreprises à épargner : l’autofinancement, et donc l’investissement, volonté de gagner en crédibilité avec des fonds plus importants, etc.
Les revenus
La théorie de la rente différentielle de Ricardo
David Ricardo distingue trois types de revenus :
La question de l'augmentation des salaires les plus bas
Les revenus attribués aux agents les plus pauvres sont souvent considérés comme des entraves au bon fonctionnement du marché. Ainsi des poor laws, qui avaient été instituées en faveur des plus démunis ; ces lois ont été largement critiquées par Malthus. Il a en effet montré que lorsque la population s’accroit, les denrées alimentaires, elles, n’augmentent pas pour autant ; cette situation risque de conduire à la famine. C’est ce qu’évoquait également René Dumont en 1960, en parlant du tiers monde, qui pour lui se trouvait dans un état d’explosion démographique (« Nous allons à la famine »). Dans cette optique, Malthus considère que l’aide aux populations défavorisées risque d’entrainer un accroissement des naissances, ce qui ne fera que renforcer la pauvreté. Pour expliquer son point de vue, il utilise la métaphore du grand banquet de la nature : un homme dont les parents n’ont pas les subsistances nécessaires pour le faire vivre est de trop dans le banquet de la nature.
Néanmoins on considère que l’assistance aux plus pauvres entraîne un accroissement de leur revenu, ce qui augmente la consommation.
Le salaire comme manifestation de l’exploitation ouvrière
Marx considère que les revenus sont attribués au travailleur en échange de sa force de travail, seul ressource qu'il ait à vendre. Pour faire des profits, les entreprises récupèrent une plus-value sur la vente des produits ; il s'agit de la différence entre les coûts de production et le prix du bien. La plus-value mesure ainsi le niveau d’exploitation des travailleurs ; la force de travail produit en effet plus de valeur que le salaire accordé au travailleur. Ainsi, le taux de profit est donc fonction du coût de production (qui comprend le capital constant correspondant aux équipements productifs et le capital variable correspondant aux salaires) et de la plus-value.
Pour Marx, la récupération de la plus-value par les capitalistes est une extorsion.