Juge administratif
Le juge administratif garantit la protection des libertés fondamentales par deux mécanismes : le contrôle de légalité et le référé-liberté. A ces mécanismes s'ajoute le contrôle de conventionnalité, qui permet au juge administratif d'apprécier l'articulation entre les normes internationales et les normes constitutionnelles.
Contrôle de légalité
Le juge administratif refuse d'exercer un contrôle de constitutionnalité de la loi : en effet, effectuer un contrôle des actes règlementaires par rapport à la Constitution reviendrait à apprécier la constitutionnalité d'une loi car la loi s'interpose entre le règlement et la Constitution. La loi fait donc écran et le juge ne peut examiner les dispositions règlementaires qui "résultent directement de la loi" (CE, 1992, Monnier-Besombe). Cette théorie dite de la loi écran a régulièrement été rappelée par le juge administratif (CE, Sect., 1936, Arrighi).
Lorsque la loi a peu de lien avec le règlement, le juge accepte d'examiner la constitutionnalité du règlement et on parle d'écran transparent (CE, 1991, Quintin).
La théorie de la loi écran posait le problème de l'application de lois éventuellement inconstitutionnelles. Depuis la révision constitutionnelle de 2008, le Conseil d'Etat peut saisir le Conseil constitutionnel d'une disposition législative par le biais de la question prioritaire de constitutionnalité. Le juge administratif peut donc désormais apprécier la constitutionnalité d'un règlement même lorsqu'il est pris sur le fondement d'une disposition législative.
Référé-liberté fondamentale (art. L521-2 CJA)
La loi du 30 juin 2000, créait une procédure spécifique de protection des libertés en permettant au juge administratif de protéger les libertés fondamentales en cas de violation des droits par une personne morale de droit public ou par une personne morale de droit privé chargé de la gestion d'un service public. La mise en œuvre du référé-liberté repose sur deux conditions :
- urgence : le juge ne peut agir que lorsque l'action de l'administration a causé une privation de liberté ou que l'exécution d'une décision administrative a de graves conséquences. Le requérant lésé par l'action de l'administration doit saisir le juge très rapidement (à l'inverse, il est difficile d'attester de l'urgence). La procédure ne peut être mise en œuvre dans le cas d'un reconduite à la frontière (procédure spéciale).
- atteinte grave et illégale à une liberté fondamentale : l'administration doit avoir porté une atteinte manifestement illégale dans l'exercice de ses compétences. L'illégalité doit être flagrante et résulter d'une décision écrite ou clairement identifiée (ex : refus d'entrée sur le territoire, placement en zone d'attente) ; néanmoins, il s'agir d'un simple agissement matériel, positif ou négatif (sans décision préalable).
Le référé-liberté repose sur une interprétation libérale de la notion de liberté fondamentale, qui inclut de nombreuses libertés (liberté d'aller et de venir, liberté de culte, liberté de réunion, liberté syndicale, principe de dignité, droit de mener une vie familiale normale, droit constitutionnel d'asile...).
Le juge peut décider de rejeter la requête, sans audience ni débat, s'il estime que la situation n'est pas urgente, que la demande est irrecevable ou infondée, ou que la demande relève du juge judiciaire. Lorsque la demande est jugée recevable, une date et une heure d'audience sont fixées (l'audience doit avoir lieu dans les 48h). La requête est ensuite communiquée à l'administration, qui pourra répondre avant ou le jour de l'audience. Le juge pourra ordonner toutes les mesures nécessaire à la sauvegarde des libertés fondamentales : suspension de l'application de la décision contestée, obligation pour l'administration d'agir dans un sens déterminé, prononcé d'astreintes financières contre l'administration, condamnation de l'administration à payer les frais de procédure... Le juge prononce seulement des mesures provisoires car il ne peut annuler les mesures contestées ni indemniser le préjudice.
La procédure de référé-liberté a été considérée comme ne garantissant pas un recours effectif au sens de l'article 13 de la Convention européenne (CEDH, 2007, Gebremedhin).