Le règne de Napoléon

Si l’on connait le coup d’Etat du 18 brumaire, on ne connait pas toujours les périples qui ont conduit Napoléon à marquer la France de son empreinte.

Le Consulat 1799-1804

Napoléon Bonaparte cherche à mettre fin aux désordres provoqués par la Révolution. C’est par la constitution du 22 frimaire an VIII que la France entre à nouveau dans la monarchie.

Pour que Napoléon soit légitime, on va s’attacher à ce que les « élections populaires » soient limitées. On considère pour cela que le simple fait, pour les français, d’approuver la constitution, suffit pour nommer Bonaparte premier consul.

On avait après la Révolution, déjà bien limité l’importance des élections du peuple. D’élections du peuple, on est passé aux élections par des collèges électoraux (assemblées de canton et collèges électoraux de département et d’arrondissements) élus à vie au suffrage quasi universel (suffrage censitaire).

Ensuite, le peuple le fait consul à vie, avant d’approuver l’hérédité impériale. Napoléon inscrit donc sa légitimité dans le temps, et installe son nouveau régime pour le temps qu’il voudra.

L’Empire 1804-1814

Napoléon fait ensuite facilement accepter au peuple l’Empire : les royalistes font peur à vouloir restaurer leurs privilèges, et les jacobins font peur car accompagnés par l’ombre de la Terreur. Il est donc sacré empereur à Notre-Dame en 1804. C’est une désignation divine, dont la légitimité ne repose plus sur le peuple mais sur la parole de Dieu. Les citoyens redeviennent des sujets. Le peuple va perdre sa souveraineté au profit de l’empereur.

L’empereur met en place un système stable, qui repose sur une fonction publique prestigieuse. Pour Napoléon, l’ascension sociale doit résulter du mérite ; c’est ainsi qu’il forme une élite. Celle-ci s’accroit avec l’apparition de la Légion d’honneur en 1802. On récompense le mérite et le service de l’Etat.

Napoléon cherche à former une fonction publique compétente, et rétablit notamment les Ponts et Chaussées qui seront pendant très longtemps les grands ingénieurs de France. Il veut éviter la politisation et impose la neutralité des agents. Du côté du gouvernement, trois consuls en ont la charge : Bonaparte, qui seul a le pouvoir de décision, Cambacérès et Lebrun. Ce gouvernement dispose d’un large pouvoir règlementaire. Les assemblées législatives voient leur rôle diminué : le Tribunat discute les lois sans les voter alors que le Corps législatif vote sans discuter. Aussi, le domaine de la loi est rétréci, ce qui laisse une plus grande marge de manœuvre au pouvoir règlementaire. Ce dernier est assisté par le Conseil d’Etat, qui deviendra juridiction administrative en 1806.

L’administration est centralisée, et un agent du gouvernement a la charge d’une circonscription (arrondissement, commune, département). Le préfet est ainsi crée par la loi du 28 pluviôse an VIII ; il a pour mission d’exécuter les ordres de l’administration centrale au niveau local. L’autoritarisme est contrebalancé par la création des Conseils de préfecture, vers lesquels les administrés peuvent se tourner pour leurs réclamations.

Napoléon entend limiter les discordances provoquées par la gauche et la droite afin de remettre de l’ordre au sein du pays. Il accepte ainsi aussi bien d’anciens révolutionnaires dans son administration que des nobles. Aussi, pour assurer la stabilité, il redonne sa place à la religion catholique : le Concordat de 1801 affirme que le catholicisme est la « religion de la majorité des français ». À côté de ces efforts de restauration de l’ordre, on déporte les dissidents : Jacobins, conspirateurs royalistes…

Le rétablissement de l’ordre ne va pas sans la religion ; pour cette raison, Napoléon laisse l’église accroitre son influence sur l’enseignement, essentiellement au primaire. L’enseignement secondaire doit former les élites du régime. Pour cela, les lycées sont crées en 1802, puis l’Université impériale apparait pour donner le monopole de l’enseignement secondaire aux lycées. Dans ces établissements, on pratique le culte de l’empereur aussi bien que la littérature, qui occupe une grande place. Les élèves sont placés dans des écoles, qui deviendront facultés ; la plupart son en droit. Mais l’enseignement scientifique de haut niveau est dispensé dans les écoles des Mines et à l’école Polytechnique. Mais l’ordre ne va pas non plus sans police. La police est donc très présente, tout comme la justice. Les libertés sont limitées, mais Napoléon tient à l’égalité, qu’il a défendue lorsqu’il était officier jacobin.

Mais l’importance est également donnée à la masse, qui doit être satisfaite pour ne pas se rebeller. Napoléon mise donc sur une économie saine. Il la restaure en créant la Banque de France, et en refusant les emprunts inhérents de l’Ancien Régime. Pour contrôler l’ensemble, la Cour des comptes est crée en 1807. L’industrie repart et le franc germinal est stable. A cette époque est aussi instauré l’impôt. Parallèlement, les dépenses militaires s’accroissent, et les conflits avec l’Angleterre également.

Napoléon, qui souhaite l’égalité et le renforcement de l’unité nationale, élabore des codes, qui formeront une compilation des textes de droit. Le plus important de ces codes sera le Code Napoléon (code civil).

Cinq codes sont rédigés : civil, commercial, pénal, procédure civile, procédure criminelle. Cette rédaction a été facilitée par la volonté du peuple, qui souhaitait retirer le laxisme révolutionnaire qui se manifestait au sein de l’ancien code pénal, promulgué dès 1791. Le code civil de 1804, rebaptisé Code Napoléon en 1807, est enclin à l’ordre : propriété privée protégée, puissance paternelle…

Une noblesse d’Empire est crée. Elle regroupe majoritairement des bourgeois, quelques gens du peuple, et d’anciens nobles. Napoléon forme ainsi une élite héritée de la Révolution.

Mais en bas de l’échelle, les ouvriers sont également en bonne posture car l’emploi est prospère à cette époque. Outre le rétablissement de l’ordre intérieur, Napoléon a une autre volonté : celle de créer un grand Empire, et de récupérer à l’Angleterre son privilège commercial. L’Angleterre ouvre la voie des hostilités en 1803, mais Napoléon parvient à mettre les îles anglaises en état de blocus en 1806. Pour que l’Angleterre le respecte, la France doit notamment l’imposer à l’Europe afin que cette dernière soie unie face à l’Angleterre. C’est alors que le pays s’enlise dans une guerre contre l’Espagne. Finalement, l’Angleterre semble céder et l’Empire français ressort plus fort de cette bataille : il couvre 750 000 km2 pour 43 millions d’habitants. La France a donc acquiert un certain nombre de territoires alentours sur lesquels elle compte garder une mainmise. Mais Napoléon va aller trop loin. Sa volonté de faire plier toute l’Europe pour lutter contre l’Angleterre s’arrête avec la bataille de Leipzig en 1813. La France va être envahie et Napoléon va devoir abdiquer en 1814.

Les Cent-Jours 1814-1815

Après la défaite, la France retrouve la royauté. Louis XVIII prend le pouvoir, en s’engageant à prendre en compte les changements nés de la Révolution et du règne napoléonien. Le traité de Paris est indulgent avec le pays : le territoire français est peu restreint, la France peut récupérer ses colonies, perdues sous Napoléon. Mais la France doit payer une indemnité de guerre, et la restauration de la royauté est difficile dans un contexte post-révolutionnaire. Les Bourbons souhaiteraient rétablir leur place, mais devant prendre en compte les acquis de l’époque, Louis XVIII élabore une Charte constitutionnelle en 1814 afin de se légitimer. Il considère ainsi son pouvoir comme légitime car issu de l’histoire et de la volonté divine.

Le roi est souverain, à la place du peuple. Il fait croire que la Constitution est voulue par le peuple, mais il n’en est rien car elle leur est imposée. On revient même sur des principes, comme en matière de religion puisque le catholicisme devient « religion de l’Etat ». Aussi, le roi dispose du pouvoir règlementaire, a l’initiative des lois, et peut dissoudre la Cambre des députés, élue au suffrage censitaire. En revanche, il convient de noter que la Charte reprend les droits et libertés affirmées plus tôt.

Mais s’il s’agit d’une monarchie, celle-ci est limitée en ce sens qu’elle a mis fin aux privilèges. Louis XVIII sait qu’il sera nécessaire de rétablir la France, épuisée par la guerre, en limitant les discordes. Mais il n’y parviendra pas car ses mesures sont impopulaires.

De son côté, de l’île d’Elbe, Napoléon observe les ratés. Ayant eu connaissance des difficultés de la France à se restaurer, il décide d’agir. Il débarque près d’Antibes avec 800 hommes, avec des mots qui rassurent les populations. Il parle citoyens, d’évincer les nobles. Mais cela ne suffit pas à rallier suffisamment de personnes, et les royalistes occupent désormais une place importante car Louis XVIII a su leur donner une autorité rassurante. Cette petite révolution n’atteindra donc pas l’ampleur espérée, mais restera quelques temps au pouvoir, après que Louis XVIII ait été évincé.

Napoléon a changé de perspective. Sa volonté d’accroitre la puissance et le territoire de son pays n’est plus aussi importante. Influencé par Benjamin Constant, grand auteur libéral, il souhaite désormais ouvrir la voie aux notables, qui considèrent que la prospérité réside dans la paix et la liberté. Pour cela, Napoléon privilégie la garantie des droits. Il propose ainsi un Acte additionnel aux constitutions de l’Empire, qui sera largement approuvé.

Mais la révolution est de courte durée car la défaite à Waterloo le 18 juin 1815 marque la fin de Napoléon, qui abdique le 22. Il part pour Sainte-Hélène, où il mourra, après avoir marqué la France à jamais.

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