Mondialisation

A force d’entendre parler de mondialisation, on n’en perd sa signification. On ne sait plus s’il s’agit d’une « horreur économique (L’horreur économique de V. Forrester) ou d’une « mondialisation heureuse » (La mondialisation heureuse de A. Minc). Pour le savoir, il convient d’en redonner les fondements, et les différentes pensées qui en relèvent.

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Qu’est-ce que la mondialisation ?

Apparue dans les années 60, la notion de mondialisation peut se définir comme l’accroissement des mouvements de biens et de services à l’échelle internationale, permettant ainsi l’extension des différents marchés. Les pays se développent ainsi en fonction de leurs avantages comparatifs (en se spécialisant dans les domaines productifs).

Le processus actuel de mondialisation se définit donc comme l’accélération des flux transfrontaliers et l’implantation du système capitaliste libéral dans le monde. Il s’agit d’un accroissement des échanges de capitaux et actifs financiers qui se concrétisent par des échanges d’actions, et une spéculation foncière. La « transnationalisation » des firmes, et ainsi la mise en place de filiales entraine des échanges croissants de marchandises et de services. C’est dans ce cadre que les altermondialistes parlent d’une « marchandisation du monde ».

Tout cela est accéléré par la déréglementation des marchés et le système des taux de change flottants. Les promondialistes considèrent que la libre circulation du capital est bénéfique à la croissance économique et permet l’enrichissement de tous et notamment des pays en retard. Au contraire, les altermondialistes estiment que le libre échange à l’échelon mondial n’entraine pour les pays en développement qu’une « détérioration des termes de l’échange ».

Le système de mondialisation repose sur la DIT (division internationale du travail), qui permet la division des étapes de production entre différents pays, en fonction des avantages comparatifs de chacun. On cherche ainsi à limiter les couts de la main d’œuvre, en attribuant à certains Etats certaines spécialisations (la Chine est par exemple considérée comme l’ « atelier du monde ») ; on limite ainsi les couts de production, ce qui permet d’accroitre les profits. Cela entraine des délocalisations.

Brève chronologie de la mondialisation

Selon les historiens, la mondialisation apparait dès le XVIe siècle, lors de la conquête de l’Amérique. Mais certains auteurs considèrent que dès l’époque de l’Empire romain s’organise autour de la Méditerranée une mondialisation. Tous s’accordent cependant sur la mise en place de ce qu’on appelle l’« économie-monde : la mondialisation s’est centrée sur l’Atlantique, ce qui a conduit à la création d’un espace mondial d’échange dès la fin du 19e siècle et du début du 20e.

Mais l’installation durable et stable de la mondialisation a été permise par différentes décisions. On peut citer à ce titre les accords du GATT (General Agreement on Tariffs and Trade) de 1947, établis afin de coordonner les politiques douanières des signataires. Dans le cadre de cet accord, l’Uruguay Round a créé l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce) en 1994 pour remplacer le GATT.

La création du G8 a également contribué à renforcer la mondialisation. Ce regroupement vient de l’idée d’une coopération entre grands pays industrialisés ; elle émerge dès la crise pétrolière en 1973. En 1975, le président français convie des pays afin de former le G6. La Canada rejoint ensuite les 6 pour former le G7 l’année suivante. La Russie se joint à eux en 1997, formant ainsi le G8 . Il s’agit d’un groupe informel établi pour suppléer les gouvernements nationaux. Les membres se retrouvent chaque année afin de mettre en place un certain nombre d’initiatives relatives à des domaines divers, tels que le développement ou l’économie. Ces rencontres sont l’occasion pour les altermondialistes de manifester leur mécontentement face à ces groupements qu’ils considèrent comme une manière de diriger le monde).

Enfin, la chute du bloc soviétique a permis aux Occidentaux d’ouvrir de nouveaux marchés à l’Est et de mettre en place d’importants échanges économiques Est/Ouest.

Enjeux de la mondialisation

Alors que certains veulent renforcer le système de mondialisation capitaliste, d’autres cherchent à le limiter, voire, à le détruire. Plusieurs groupes de pensée sont à étudier.

Les libertariens estiment que le marché doit s’auto réguler et qu’aucune entrave ne viennent s’y immiscer. Les libéraux considèrent que la « main invisible » œuvre seule, mais que les Etats peuvent avoir à réguler certaines crises et externalités négatives (propagations de conséquences néfastes). Les sociaux-libéraux considèrent que le marché doit pouvoir être régulé par l’Etat. Les régulationnistes veulent également réguler le marché, qui, seul, fonctionne parfois mal.

Il existe une scission entre les partisans de l’ouverture et ceux de la fermeture. Les premiers accordent une pleine confiance aux institutions internationales pour la bonne mise en place des échanges mondiaux. Ils sont partisans d’une gouvernance globale. En revanche, les seconds restent attachés à la nation et à l’ordre d’un pays. Mais plusieurs branches émergent de cette idée : certains souhaitent que l’Etat se voit réattribuer certains missions lui étant auparavant attribuées, alors que d’autres veulent redonner à l’Etat-nation toute sa force et refusent la gouvernance globale dans le sens où les institutions internationales politiques et économiques ne devraient pas exister. C’est la position adoptée par les « souverainistes ».

La mondialisation a diverses conséquences : importants flux financiers, importants flux migratoires, importantes diffusions des informations. Cela entraine ainsi une diffusion de la culture, qui devient alors une culture de masse puisque copiée aux quatre coins du monde. On évoque en effet généralement l’impérialisme culturel américain. On assiste ainsi à une « occidentalisation » du monde, ce qui est dénoncé par les anticapitalistes notamment. La mondialisation entraine également des ouvertures vers des pays pauvres ; c’est ainsi que les délocalisations industrielles se mettent en place afin d’améliorer la compétitivité des entreprises.

Mais la mondialisation n’entraine pas que des effets négatifs puisqu’elle conduit également à dénoncer plus facilement les atteintes aux libertés par exemple, et permettent aux Etats d’aider ceux en difficulté.

Forces et oppositions

Dans le cadre de la mondialisation, plusieurs courants de pensée émergent. Certains voient en elle un moyen de développement et d’enrichissement ; d’autres y voient un enrichissement unilatéral, en faveur des pays du Nord. Nous allons étudier ces principaux courants.

Promondialistes

Les courants néo-libéraux et néo-conservateurs des années 1980-1990 ont largement contribué à la diffusion des idées promondialistes. Les cercles de réflexions, think tanks, partis politiques ou encore revues de presses ont également contribué à une époque où ces idées sont les bienvenues. C’est en effet l’époque où les principes keynésiens trouvent leurs limites et où les autres courants de pensées (union soviétique) prennent fin.

C’est dans ce cadre qu’œuvre Margaret Thatcher, qui considère qu’ « il n’y a pas de solution alternative », mais une « pensée unique ». Ce sont donc bien les promondialistes qui occupent le pouvoir depuis ces années-là.

Leur pensée relève du libéralisme, et de l’internationalisme. Manfred B. Steger montre que cette pensée repose sur la limitation des contraintes et la diffusion de la démocratie, qui peut au mieux diffuser le libéralisme économique. Cela doit permettre de tendre vers un monde uni, qui diffuse les cultures, les technologies, et qui pour cela se fonde sur l’innovation et le progrès. Cet espace aux frontières floues permettrait, selon Kant, d’atteindre une paix définitive entre les Etats lorsque ceux-ci n’auront plus de frontières.

Altermondialistes

A côté du pouvoir, d’autres forces se mobilisent contre la mondialisation. Ces contre-pouvoirs, qui ne sont ni regroupés en syndicats, ni en partis politiques, souhaitent refonder la mondialisation. La Charte du forum social de Porto Alegre définit les objectifs de l’altermondialisme : mettre en place une mondialisation solidaire respectant les droits de l’homme, l’environnement… L’altermondialisme est majoritairement représenté par ATTAC (Action pour une taxe Tobin (taxe sur les transactions financières) d’autre aux citoyens). Il s’agit donc des opposants à la mondialisation libérale, qui dénoncent la « dictature des marchés financiers » car la sphère sociale se soumet à la finance mondiale et donc au profit. On licencie donc pour des raisons de rentabilité. Les firmes multinationales ont aujourd’hui un pouvoir qui s’impose aux Etats (mythe de la world company) ; c’est ce que dénoncent les altermondialistes.

ATTAC souhaite, comme le dit Jacques Nikonoff, « déconstruire l’idéologie néo-libérale dans nos têtes » pour « penser à nouveau librement ». Il ne s’agit pas de détruire le capitalisme et la mondialisation, mais de rendre le monde plus juste, plus équitable. Ils refusent donc les inégalités qui peuvent apparaitre avec le Sud.

Antimondialistes

Certains, plus radicaux, les « antimondialistes », cherchent à détruire le système actuel et à refonder les frontières des Etats. Cette pensée est reprise aussi bien par l’extrême droite que par la gauche anticapitaliste.

Ils rejettent totalement le libre-échange, et cherchent au contraire à restaurer la nation, qui s’est émiettée par l’internationalisation des échanges. Cela explique pourquoi la droite souverainiste fait aussi bien parti de ce courant de pensée que la gauche extrême : les premiers souhaitent retrouver la force de l’Etat, alors que les autres souhaitent renouer avec la solidarité de la nation (par exemple, par la mise en œuvre d’une démocratie participative locale). Ils cherchent ainsi à tout réglementer, à retourner au protectionnisme d’avant guerre, ou encore à taxer les flux financiers. Cette « déglobalization » (Walden Bello) irait selon certains jusqu’à la destruction du capitalisme.

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