Non conformité

Lorsque des situations conduisent l'individu à se sentir menacé dans son indépendance, il peut réagir en y résistant. C'est ce qu'on appelle la "réactance". Il s'agit d'une résistance individuelle à la pression sociale , à l'influence extérieure: face à une éventuelle perte d'indépendance, l'individu, mû par ses valeurs, sentiments et croyances personnelles d'indépendance, cherche à retrouver sa liberté perdue. Ainsi, plus le sentiment de liberté diminue, plus l'individu résiste, surtout on porte atteinte à un comportement qui a de l'importance pour lui.

Dans une expérience (Wicklund et Brehm, 1976), on informait des élèves qu'un conférencier viendrait parler de l'abaissement de l'âge de vote. Alors qu'ils étaient majoritairement favorables à cette mesure, tout comme le conférencier, ce dernier se voyait décommandé le jour même de sa venue. A certains élèves, il était dit qu'il n'avait pu venir car il était malade. Aux autres, on disait que sa venue avait été interdite en raison de ses positions en faveurs de l'abaissement de l'âge du vote. Il en ressort que les élèves informés de la censure s'étaient renforcés dans leur position favorable à la mesure.

L'envie de résister résulte aussi parfois d'un besoin de se distinguer de la masse. En effet, lorsqu'on demande à des sujets de donner leur avis après leur avoir dit que la grande majorité des gens pensaient d'une certaine façon, alors ils ont fortement tendance à s'en détacher. Ils affichent une faible conformité à l'opinion majoritaire, ayant besoin de s'affirmer vis-à-vis des autres. Ainsi, en cherchant à se particulariser, l'individu pourra adopter un comportement déviant.

Ce mécanisme de résistance peut aussi résulter de normes sociales devenues si floues que la conduite des individus ne peut plus s'appuyer sur des règles claires. C'est ce qu'on appelle l'anomie.

Le concept d'anomie a été forgé par Durkheim pour expliquer les effets causés par les conflits entre valeurs et normes conduisant à un dérèglement social.

Le déclin des valeurs traditionnelles, qui perdent de leur solidité et de leur clarté, amène en effet à un dérèglement entre l'individu et la société. Le système social se complexifie et les règles se multiplient, conduisant à l'atomisation de la société.

Mais l'anomie pourrait aussi résulter de l'incapacité des individus à atteindre des objectifs que la société enjoint pourtant à atteindre (Merton, 1949). Par exemple, réussir professionnellement est socialement considéré comme un but, une référence à laquelle se rattachent les individus. Mais cela peut supposer d'y arriver par des moyens que bon nombre d'individus n'ont pas en raison de leur condition sociale. Aussi arrive-t-il que pour atteindre un objectif certains emploient des moyens et adoptent des comportements ne respectant pas les normes.

Face à ces comportements déviants, la majorité tente souvent de ramener sur le droit chemin le déviant (Schachter, 1951). Elle tente en effet par la discussion de le conformer à leur propre opinion. Et si cela ne fonctionne pas, alors la pression exercée sur le déviant cesse et celui-ci est rejeté (Levine, 1980). Et pour cause, toute déviance remet en cause l'ordre social et la cohésion du groupe. S'il n'y a pas de consensus autour des règles sociales, alors les individus n'ont plus la même vision de la réalité sociale, ce qui en effet ne peut être toléré. En revanche, s'il ne s'agit que de petits écarts à la norme, cela ne fait pas courir le risque de dislocation du groupe et n'occasionne pas de réelle pression ni de rejet.