Engagement
Pour conduire les individus à changer d'attitude, il existe différentes techniques de changement basées sur la dissonance (Festinger,1957) ou l’engagement (Kiesler,1971) : il ne s'agit pas de modifier les croyances, mais de faire agir pour pour induire un changement du comportement et des croyances.
La théorie de l'engagement
Les individus qui changent d'avis ou qui ont l'intention d'agir ne le font pas nécessairement. Les idées sont insuffisantes. Ainsi, afin de produire un changement d'attitude chez un individu, il ne s'agit pas de l'informer, de le former ou d'argumenter, mais de lui faire réaliser des actes. En modifiant ainsi son comportement, il fera évoluer ses idées, et sa résistance au changement sera brisée.
En effet, les individus agissent et pensent en fonction de leurs actes antérieurs et en fonction des situations sociales dans lesquelles ils se trouvent pris (R.V. Joule et J.-L. Beauvois). Dès les années 1970, Kiesler démontrait à travers sa théorie de l’engagement que les individus pensent et agissent en fonction de leurs actes antérieurs ("seuls nos actes nous engagent"). Ainsi, une fois qu'ils ont agit d'une certaine manière, leur conduite sera moins modifiable ; l'engagement aura conduit à une forte résistance au changement (au niveau des conduites et au niveau cognitif).
En outre, si les nouveaux comportements effectués par la personne entrent en contradiction avec ses valeurs et croyances initiales (actes problématiques), celle-ci sera contrainte de modifier ses attitudes pour qu'elles s'adaptent au nouvel état de fait. Cela permet de restaurer une plus grande consistance entre les actes et les attitudes. Mais si les nouveaux comportements confirmaient les convictions et opinions initiales (actes non-problématiques), alors l'ensemble conforte la personne dans ses certitudes et celle-ci deviendra peu perméable aux arguments contraires ultérieurs.
Facteurs d'engagement
Si la personne se sent libre, elle sera plus encline à la réalisation de certains actes (Girandola, 2003). En effet, le changement obtenu chez une personne est d'autant plus résistant aux pressions ultérieures qu'elle va s'attribuer la réalisation de l’acte effectué, même si en réalité cela a été fait indépendamment de sa volonté. Mais plus la personne avait le choix d'agir, plus elle va se sentir engagée.
De même, si l'acte effectué est public (car il est visible des autres), l'individu se sentira d'autant plus engagé. En demeurant consistant dans ses attitudes, et donc en restant engagé dans les nouveaux comportements, il maintient son image et son identité. C'est en effet la recherche de consistance qui explique en partie la consolidation du changement (Kiesler, 1971).
En outre, si l'acte (ou des actes similaires) a été répété, coûteux et irréversible, l'individu sera fortement engagé. Enfin, les représentations sociales (savoirs transmis entre les individus pour donner un sens au monde qui les entoure et régir leurs conduites) expliquent la façon dont les individus se comportent.
Techniques d'engagement
Pour conduire quelqu'un à réaliser quelque chose, on demande explicitement (éventuellement de façon répétitive) à effectuer des actes intermédiaires et préparatoires, peu coûteux en efforts et allant dans le sens du changement.
Or l’engagement par les actes ouvre la voie à un réel changement des comportements sur le moyen et long terme. Et pour cause, une fois qu'ils ont commencé à agir (ex: attendre le bus), les individus ont tendance à persévérer même si la situation ne leur convient pas ou qu'elle devient trop coûteuse en temps, en argent ou en énergie (ex: continuer à attendre un bus qui n'arrive pas). C'est ce que l'on appelle le "piège abscons" (Brockner, Slaw, Rubin, 1979) ou "dépense gâchée".
Ainsi, c'est en réalisant des actes qu'elles n’auraient pas réalisés spontanément (« soumission librement consentie » de Joule) que les personnes vont finir par stabiliser un nouveau comportement, en agissant dans le droit fil de la première décision malgré des retours négatifs : c'est l’escalade dans l’engagement. Cette obstination résulterait de la tendance individuelle à adhérer à sa décision (Lewin, 1947) en la concrétisant voire en persévérant. Les individus ont en effet du mal à revenir sur leurs propres décisions et à les rationaliser par de nouvelles décisions allant dans le même sens. Cela réduit la dissonance cognitive née de la prise de conscience d'une mauvaise décision passée, même si l'individu doit justifier cette mauvaise décision par une autre décision plus coûteuse que la première (rationalisation en acte).
Pour amorcer le changement, différentes techniques sont utilisées :
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La technique dite du "pied dans la porte". Il s'agit de demander à quelqu'un d'effectuer un acte peu coûteux et non-problématique (comportement préparatoire). Cela va préparer à l'acceptation d'une demande beaucoup plus importante effectuée dans un second temps et liée à la première (comportement-cible). Déjà engagée, la personne continue en effet dans le même sens.
A la technique du pied dans la porte peut s'ajouter celle de l’étiquetage, qui consiste à attribuer une raison interne à la personne qui a réalisé le comportement préparatoire ("vous êtes une bonne personne"). -
La technique dite de "la porte au nez" repose quant à elle sur une première demande extrêmement couteuse que l'individu refuse (ex: manifester dans la rue). Puis, peu de temps après (ex: moins d'un jour), on demande à la personne de bien vouloir faire quelque chose de moins couteux, mais lié au même sujet (ex: distribuer des tracts dans sa rue). Cela s'expliquerait notamment par la norme de réciprocité (s'estimer redevable de faire des concessions lorsqu'on a l'impression que l'autre en fait).
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La technique de l’« amorçage » consiste à présenter un stimulus (l’amorce) qui aura un effet sur le traitement d’un stimulus postérieur (la cible) : il s'agit d'obtenir, via un mensonge ou une omission, l'engagement d'une personne (qui ne sait alors pas ce que cela va lui coûter) qui dès lors ne pourra plus revenir en arrière (en raison de l'effet de gel). De même, si l'on rend impossible la réalisation d'une décision en proposant un autre comportement, alors la personne aura tendance à le suivre (technique du leurre).
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La technique de l’acquiescement répété consiste à poser des questions auxquelles l'interlocuteur répondra chaque fois « oui », ce qui augmentera la probabilité qu'il accepte une requête ultérieure.
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L’implémentation des intentions consiste à demander ce que la personne compte faire pour réaliser l'acte : comment ? quand ? Cette technique de l’implémentation des intentions est souvent utilisée dans le domaine de la santé.
Il existe d'autres techniques de manipulation, à l'instar de techniques de mise en condition (ex: instauration d'une ambiance positive).