Contexte de la guerre en Ukraine

Indépendante depuis 1991, l’Ukraine ne contrôle depuis 2014 qu'une partie de son territoire, ayant été amputée de la Crimée et d'une partie du Donbass.

Situation géopolitique

Autrefois République Socialiste Soviétique (RSS) d’Ukraine annexée en 1945 par Staline, le pays regroupe plusieurs régions appartenant jusqu’à récemment à différents empires (austro-hongrois et russe) et à plusieurs Etats (Russie, Pologne et Roumanie). La population y est donc hétérogène, dans ses traditions et sa culture.

En Ukraine se mêlent le catholicisme et l’orthodoxie mais aussi trois langues différentes (russe, biélorusse et ukrainien) malgré un tronc commun slave oriental. La langue ukrainienne n’est ainsi la langue maternelle que de 68,5 % de la population, beaucoup se considérant de langue maternelle russe. Ces divergences culturelles ont entraîné litiges linguistiques et tensions religieuses.

L’Ukraine est aussi caractérisée par sa situation géographique particulière : en situation de carrefour, sur le plan tant économique que culturel ou stratégique, ce “pivot géopolitique“ a été disputé par les États voisins depuis le XIIIe siècle, ce qui a conduit au passage ou à l’occupation de nombreuses armées.

D’un point de vue géographique, l’Ukraine est traversée par une immense plaine s’étendant de l’Allemagne à la Russie, dans un relief général peu accidenté. Par ailleurs, les montagnes sont moyennement élevées et le pays dispose d’un littoral composé d’une côte basse et sableuse. Bénéficiant majoritairement d’un climat continental (relativement tempéré), le pays profite d’une bonne hydrographie et plusieurs fleuves le traversent ou le bordent pour se jeter dans la mer Noire. Le pays est un important producteur agricole (blé, maïs, graines de tournesol, etc.) et a longtemps bénéficié d’une industrie puissante. Pourtant, et bien qu’il dispose de matières premières, le pays demeure dépendant. Au-delà des matières premières, l’ensemble du secteur secondaire se trouve dans une dépendance énergétique totale vis-à-vis Russie.

Aujourd’hui encore, l’Ukraine demeure un pays relativement faible, tiraillé entre l'Occident qui l'attire et la Russie qu'elle craint.

Historique récent

En 2013, le gouvernement ukrainien annonçait qu’il ne signerait pas d’accord d’association avec l’UE. Face à cette annonce, un mouvement pro-européen (Maïdan) va émerger et provoquer la destitution du président ukrainien pro-russe (V. Ianoukovitch) au profit d'un pro-européen.

L'Ukraine basculant ainsi dans le camp occidental et inaugurant les prémices d'une intégrations à l'OTAN. Les russophones du pays se sont alors élevés contre le gouvernement de transition, accroissant ainsi les tensions dans la République autonome de Crimée, majoritairement prorusse. Après un référendum organisé dans la région pour déterminer un rattachement à la Russie, le voisin russe prenait acte de la volonté du peuple de Crimée et annexait la région.

La Crimée avait été rattachée à l’Ukraine en 1954 par Khrouchtchev. Elle a été l'objet d'instrumentalisations en 2014 dans ce que certains considèrent comme une opération de renseignement américaine.

C'est dans ce contexte que les séparatistes prorusses ont gagné du terrain dans la partie russophone de l’Ukraine, le Donbass. Soutenus par Moscou, ceux-ci vont s'opposer au nouveau régime ukrainien et autoproclamer une partie des territoires « républiques populaires » de Donetsk et Louhansk. Les séparatistes et Kiev vont ainsi s'enliser dans un conflit causant des milliers de morts.

Or cela aurait dû être empêché par les accords de Minsk, conclus en 2014 et 2015 entre les deux camps. Mais constamment violés, ces accords n'ont pas empêché Kiev de poursuivre pendant des années ses bombardements dans le Donbass.

Les accords de Minsk prévoyaient le maintien de Donetsk et Louhansk au sein de l'Ukraine. Or en 2015, ces territoires avaient procédé à des référendums concluant à la volonté populaire d'indépendance et d'entrée dans la Fédération de Russie. Mais l'Ukraine a préféré tenté de refonder l'unité de régions historiquement diverses. Contre les accords de Minsk, qui prévoyaient une certaine autonomie du Donbass, le pays a en effet cherché l'unité. Ainsi, alors que les minorités de ces régions devaient bénéficier d'une autonomie linguistique, l'Ukraine a marginalisé leurs langues (ex: imposition de la langue ukrainienne dans les magasins). C'est ainsi que les russophones se sont sentis des citoyens de seconde zone. La Russie s'est alors appuyée sur ces ressentiments pour obtenir la Crimée en 2014.

Ce conflit n'a pas non plus été freiné par la communauté internationale. Alors que la Russie aidait les séparatistes, l'Occident fournissait dans le même temps à l'Ukraine une assistance militaire et d'importants fonds financiers.

Par ailleurs, l'Occident a continué à renforcer sa présence autour des frontières russes, des milliers de soldats américains et européens ayant été déployés dans les républiques baltes, en Pologne, en Roumanie et en Bulgarie. En outre, des systèmes d’armement stratégiques (bouclier anti-missiles) y ont été installés, des bases militaires construites et des manœuvres militaires effectuées à proximité des frontières russes. Ainsi, l'OTAN s'est toujours davantage étendue vers l'est.

Outre l'aide des Etats-Unis et de l'OTAN, le Canada a formé des militaires en Ukraine (opération UNIFIER) et des forces armées canadiennes y sont présentes depuis des années. Les forces militaires ukrainiennes sont ainsi passées de 6.000 soldats en 2014 à 150.000 en 2022.

Face à cette extension contrevenant à des accords conclus après la chute de l'URSS, la Russie a déployé des milliers de soldats à sa frontière. Elle est toutefois demeurée cantonnée à son territoire, tandis que l'Occident avançait ses pions dans sa direction. Aussi les Russes se sont-ils progressivement sentis encerclés par l'Occident. Toutefois, la Russie a elle-même riposté par divers moyens, notamment à travers des cyberattaques affectant l'Ukraine.

La Russie a signé de nombreux accords militaires avec la Bosnie, la Serbie ou encore la Macédoine. Aussi, elle a créé un réseau de distribution de gaz qui évite l’Ukraine en passant par les Balkans.

Situation actuelle

En 2022, après une escalade de tensions et la reconnaissance de l’indépendance des territoires séparatistes, la Russie décidait d'envahir l'Ukraine.

Les médias sont devenus un véritable champ de bataille en relayant les informations issues de chacun des deux camps. Durant des mois, les relais occidentaux présentaient une situation alarmiste quant à l'imminence d'une offensive russe en Ukraine alors que les Russes démentaient toute intention belliqueuse, ne cessant d’appeler Washington, Londres et l’OTAN à « cesser de propager des absurdités ». Moscou disait vouloir dissuader Kiev de mener une offensive contre les républiques séparatistes du Donbass. En outre, elle adressait des signaux contradictoires afin de créer la confusion et de décrédibiliser les médias occidentaux, qui annonçaient une guerre ne venant pas.

Déclarant défendre les citoyens vivant dans les régions de Donetsk et Lougansk en raison de leurs liens étroits avec la Russie, cette dernière cherchait à démilitariser son voisin afin que cesse la guerre. La Russie devait ainsi apparaître comme une puissance humanitaire visant la protection des civils du Donbass pris en otages depuis des années.

Au-delà de la démilitarisation, à travers son entreprise de "dénazification", Vladimir Poutine disait vouloir faire payer les responsables du massacre d'Odessa de 2014 (partisans du mouvement anti-maïdan brûlés vifs ou asphyxiés), mais aussi affaiblir la part croissante de membres d’organisations d'extrême droite dans les forces de l’ordre et les forces armées (ex: mouvement ethno-nationaliste Centuria) qui œuvrent contre l’intervention de la Russie.

Rapidement, Moscou est parvenue à démilitariser l'Ukraine, éloignant ainsi l'OTAN de son territoire. Désireuse de protéger ses frontières et de faire sortir du giron ukrainien la Crimée autant que les régions de Donetsk et Lougansk, la Russie dénonçait en effet depuis des années l'avancée occidentale. Elle critiquait également l'attitude des Etats-Unis et de l'OTAN, estimant qu'ils avaient laissé Kiev violer les accords de Minsk durant des années en menant une guerre sans fin contre le Donbass (notamment culturelle et linguistique). Or le président russe disait souhaiter une solution diplomatique à ce conflit, ce qu'aurait refusé l'Occident, les demandes de Moscou ayant généralement été rejetées (demandes multiples de respect des accords de Minsk).

Outre le respect des accords de Minsk de 2015, la Russie demandait le retour à la situation de 1997, lorsque l'acte fondateur des relations entre la Russie et l'OTAN a été fondé. Elle refuse donc l'expansion de l'OTAN vers l'Est qui conduit à son encerclement ainsi que le déploiement d'armes offensives à proximité des frontières russes. Pour cela, elle souhaite éviter l'intégration de l'Ukraine à l'OTAN. A l'instar de la doctrine Monroe américaine, la Russie entend donc garder un droit de regard dans son espace d’influence historique (périphérie post-soviétique incluant les Etats baltes, l’Ukraine et la Géorgie et région de l'est-européen, qui inclue la Pologne et la Roumanie), ce, afin d'éloigner toute menace contre ses intérêts nationaux. La Russie dit promouvoir un monde multipolaire et non polarisé autour des Etats-Unis. La reconnaissance de l'indépendance des territoires séparatistes dans le Donbass et leur invasion devait donc permettre de faire reculer l'OTAN.

Les Russes ont alors effectué une avancée très rapide avant d'opérer par encerclement, puis par de petites avancées dans les points de résistance.

La Russie dispose par ailleurs d'une avance technologique sur ses rivaux occidentaux, ce qui entrave toute riposte adverse (armes hypersoniques, missiles intercontinentaux suborbitaux, torpilles à propulsion nucléaire à portée infinie, etc.).

De leur côté, les Occidentaux dénonçaient l'invasion russe. Considérant que la Russie avait refusé toute voie diplomatique, ils s'opposaient à cette agression militaire en infligeant de nouvelles sanctions à la Russie.

Depuis des années, les Occidentaux tentent de freiner les velléités russes par le biais des sanctions. Considérant que la Russie souhaite retrouver sa puissance d'antan, les Etats-Unis souhaitent dissuader son développement et étendre leur zone d'influence dans la région eurasienne. Ils tentent également d'éviter tout rapprochement russo-européen, et ainsi de bloquer l’émergence d’une puissance eurasienne susceptible de contester leur suprématie en les écartant de cette région stratégique. Pour cela, l'Occident maintient une tension aux frontières de la Russie, ce qui explique les évènements qui ont eu lieu en Ukraine, en Géorgie, en Biélorussie et dans le Caucase ces dernières années. Malgré cela, il a connu quelques revers, notamment avec le développement de Nord Stream 2, fragilisant des Etats-Unis déplorant le rapprochement entre l'Allemagne et la Russie.

Au-delà des sanctions, et si aucune riposte miliaire d'envergure n'était envisagée par les Occidentaux, plusieurs États (Pays-Bas, Allemagne, France, etc.) ont décidé d'envoyer des armes à l'Ukraine (lance-roquettes antichar, missiles sol-air Stinger, etc.) afin de favoriser leur autodéfense. Aussi, dès le déclenchement de la guerre, les Occidentaux ont gelé 300 milliards de dollars de réserves russes placées dans les pays occidentaux. En réponse à ce «gel», la Russie ont décidé que les importations de gaz ou de pétrole russe par les pays occidentaux devraient être réglées en roubles ou en yuans chinois.

Ce gel révélait la fragilité du dollar, n'étant ainsi pas une réserve de valeur totalement sûre pour ceux qui se désalignent de la politique américaine. Si cela tendait à amorcer une dédollarisation de l'économie mondiale, le poids économique international des Etats-Unis demeure tel que le dollar domine encore le paysage.

Le pôle occidental s'est également renforcé, notamment à travers les demandes d'adhésion à l'OTAN de la Finlande et de la Suède, qui mettaient fin à une neutralité historique. Ce serait donc à une guerre par procuration que se livreraient la Russie et l'OTAN, les Etats-Unis cherchant en effet depuis des années à isoler la Russie sur la scène internationale.

Selon certains observateurs, l'envoi d'armes suscitait des craintes quant à ce qu'elles deviendraient dans les années à venir, des réseaux du crime organisé étant susceptibles de s'en emparer. Et pour cause, l'Ukraine a été une plaque tournante du trafic d'armes à la fin des années 1990 et en 2014, l’invasion de l’Ukraine par la Russie avait été l'occasion de nouveaux trafics. Aussi l’inspecteur général du Pentagone avait-il soulevée la question de la surveillance de l’utilisation finale des armes envoyées en Ukraine en 2020.

De leur côté, la Chine et l'Iran soutiennent, dans une certaine mesure, l'action russe. La Chine considère en effet que les Etats-Unis ne respectent généralement pas "la souveraineté et l’intégrité territoriale des autres pays quand ils fomentent des révolutions de couleurs et interviennent dans leurs affaires intérieures partout dans le monde" (Hua Chunying). Il estiment en outre que l'OTAN a adopté une posture de plus en plus belliqueuse au fil des ans.

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