L'idée européenne
En réaction à certains évènements (coup de Prague, Kominform),
les Etats d’Europe avaient décidé de créer une organisation
favorisant la paix entre les peuples par le renforcement de leur
coopération dans certains domaines. Les tensions qui animent les
deux blocs les incitent à former une organisation qui s’en éloigne
et s’indépendantise par leur économie, mais également par leur
politique. Si des différences existent entre les pays qui
souhaitaient coopérer au sein d’une communauté européenne, tous
avaient en tête l’idée de garantir une paix durable sur le
Continent. Conscient de l’échec du traité de Versailles, les Etats
veulent créer des liens durables qui reposent sur des intérêts
communs ; la convergence des intérêts favorise en effet la bonne
entente entre Etats. Mais les objectifs sont avant tout économiques
: les pays européens souhaitent construire une économie favorable
au commerce, qui repose sur de solides bases.
On pensait déjà bien avant la guerre à créer une organisation
destinée à maintien de la paix ; celle-ci ne vit pas le jour (de la
même façon qu’au 19e siècle avec le mouvement pan-européen). Avec
la fin de la Seconde guerre mondiale, les volontés européennes
doivent composer avec ceux qui remettent l’Europe sur pied, les
Etats-Unis. La reconstruction ne peut en effet se faire sans leur
aide. Mais, au départ peu favorables à la construction de l’Europe,
les Etats-Unis vont tout d’abord se montrer réticents à
l’élaboration d’une coopération entre les Etats d’Europe. C’est
finalement leur enlisement dans la guerre froide qui va changer la
donne : les américains souhaitent désormais créer un contrepoids à
la menace soviétique. C’est ainsi qu’ils vont rapidement considérer
nécessaire la constitution d’une Europe sur laquelle ils conservent
leur influence par le biais du Plan Marshall. Dans ce cadre,
Winston Churchill annonce en 1946 sa volonté de créer les
Etats-Unis d’Europe. De cette première idée découlent des
mouvements d’opinion comme l’Union européenne des fédéralistes ;
néanmoins, les prémices du mouvement européen n’apparaissent
réellement qu’en 1948. En effet, c’est lors d’un Congrès à la Haye,
et sous la présidence de Churchill, que se dessineront les premiers
traits de l’Europe.
Les difficultés soulevées par la construction européenne
La difficulté réside dans l'alliance entre un organe politique
unifié et la conservation de l’indépendance étatique. La
construction européenne conduit en effet à remettre en cause les
grandes notions propres à l'Etat souverain.
- Etat-nation : association entre un cadre institutionnel et
juridictionnel et une appartenance culturelle et morale. L'Union
européenne met à mal cette conception, les Etats membres n'étant
pas liés par une histoire commune. Néanmoins, les systèmes
politiques et économiques de ces Etats sont équivalents, ce qui
favorise leur rapprochement.
- Souveraineté : les Six livres de la République de Bodin
annoncent l’idée que la souveraineté légitime le pouvoir. L'Europe
remet en cause l'idée de souveraineté nationale, car celle-ci n'est
plus absolue et illimitée, mais partagée. Néanmoins, l'intégration
européenne ne conduit pas au renoncement de la souveraineté des
Etats membres ; chaque Etat participe aux prises de décisions de
l'Union.
- Frontières : elles montrent l’appartenance à un peuple, à une
culture ; elles sont souvent source de conflits. Les frontières
nationales sont progressivement abolies par la construction
européenne, sous l'effet du marché unique ou des accords de
Schengen. Aujourd'hui, c'est la question des frontières entre
l'Europe et le reste du monde qui pose problème ; l'intégration
d'Etats éloignés géographiquement pose en effet la question des
frontières de l'Europe.
- Citoyens : les valeurs citoyennes apportent une dimension
éthique qui influence les droits individuels. Les valeurs actuelles
donnent une importance toute particulière aux droits humains,
importance qui se retrouve dans le droit communautaire. Néanmoins,
la notion de citoyen européen n'est pas entré dans les esprits
malgré les tentatives des dirigeants. La citoyenneté européenne
n'apporte en effet aujourd'hui rien de plus que la citoyenneté
nationale et la montée des mouvements anti-européens freine son
importance.